“C’est une histoire d’amour tragique entre deux personnes qui pensent qu’elles doivent rester ensemble mais dont la relation est un échec. En fait, c’est une histoire banale” dit de son film le réalisateur Sam Mendes (1965 – ). Mais d’une histoire banale, il tire un film passionnant qui peut se lire à plusieurs niveaux.
Celui de la chronique de la vie quotidienne dans une banlieue du Connecticut au milieu des années 50, une vie engoncée dans un besoin de conformisme et sous le regard scrutateur du voisinage. Frank ( Leonardo DiCaprio) rejoint chaque matin le flot de “cols blancs” qui débarque à Manhattan (remarquable séquence qui nous renvoie à la série “Penn Station” de Louis Stettner évoquée ce mois-ci), puis retrouve son box et ses collègues, avant d’entamer une journée inintéressante … Photographie sociologique d’une époque dominée par les hommes, où les femmes n’apparaissent que comme dactylos ou mères au foyer, sans prise sur leur avenir, ni même sur leur corps. Récit universel de la vie de couple, basée sur les compromis, la négociation autour des ambitions et des espoirs de chacun. April (Kate Winslet) n’a pas réussi à devenir l’actrice qu’elle ambitionnait d’être et pour échapper à la grisaille de sa vie, elle rêve de partir à Paris, dans une fuite en avant. Frank déclare se contenter d’un emploi médiocre, faute d’avoir le courage d’être celui qu’il voudrait devenir ou d’accomplir ce que sa femme projette pour lui. Les tentatives de manipulation et les trahisons les enfermeront dans un “vide sans espoir”.
Sam Mendes est l’un de mes cinéastes préférés, depuis “American Beauty” ( 1999 – qui figurera assurément un jour parmi les films de ce blog) en passant par “Skyfall” (2012 – le meilleur des James Bond à mes yeux) et “1917” (2019 – un défi historique et technique). Je le place parmi les meilleurs de sa génération, les James Gray, David Fincher, Paul Thomas Anderson, Christopher Nolan. Tous ont en commun un talent incroyable, une capacité à varier les genres et quelque soit le thème traité, à renouveler mon enthousiasme pour le cinéma américain. Et par les temps qui courent …