L’une des raisons qui me font aimer les films de Bertrand Tavernier, c’est sa volonté d’aborder des sujets sans triche. Quand il réalise “L627” en 1992, il exprime sa révolte devant l’inefficacité des politiques et de la police face au trafic de drogue. A l’image d’un Sydney Lumet, cinéaste américain qu’il respecte pour sa capacité à restituer sans fard la criminalité à New-York, Tavernier filme la misère de l’époque : les squats où sévissent les dealers africains et arabes et où survivent les immigrants illégaux, les junkies laissés à leur désespérance, les flics avec leurs moyens dérisoires et leurs petits arrangements. Tout est cash ! Dans cet univers déprimant surnage un enquêteur, Lulu. Au contraire de la plupart de ses collègues, il est révolté, il veut obtenir des résultats, quitte à mettre en péril sa carrière et sa vie personnelle. Didier Bezace porte magnifiquement la révolte de ce franc-tireur, un peu Don Quichotte, et les autres acteurs sont excellents.
J’interrogeais il y a quelques jours un camarade, commissaire récemment retraité, pour savoir s’il jugeait la situation décrite en 1992 par Tavernier toujours d’actualité. Sa réponse a fusé: “c’est pire !”