“Lady for a Day” de Frank Capra (1933)

“Apple Annie” est une clocharde qui vend des pommes sur Times Square. Sa fille, qui vit en Europe, lui annonce qu’elle arrive à New-York pour lui présenter son fiancé, un jeune aristocrate espagnol, accompagné de son père. Précision utile : Annie adresse depuis des années à sa fille des lettres à l’en-tête d’un palace, lui laissant entendre qu’elle fait partie de la haute société new-yorkaise …

Branle-bas de combat ! Les amis d’Annie vont l’aider à donner le change ! “Dave the Dude”, un mafieux local, considère Annie comme son porte-bonheur. Il va mobiliser son réseau d’escrocs, d’hôtesses et d’hommes de main pour transformer Annie en “Grande Dame d’un jour” …

“Lady For a Day” est une comédie extrêmement réussie. En 1932, La Grande Dépression a généré 14 millions de chômeurs, soit 25% de la population active, et les faillites s’enchaînent. Les Studios d’Hollywood connaissent des difficultés à leur tour et il devient impératif de distraire les Américains.

Frank Capra (1897 – 1991) va s’y employer. Le message est simple : en s’entraidant, il est possible de réaliser l’impossible. Du pain bénit pour Roosevelt qui a lancé son New Deal depuis un an. Certains reprocheront à Capra de tomber dans un évangélisme “boy-scout”. Qu’importe ! La défense des faibles, la foi dans les petites gens, une méfiance vis à vis des puissants et un état d’esprit résolument optimiste vont redonner confiance à beaucoup et continuent à séduire près d’un siècle après. Précisons que Capra n’hésite pas à montrer la dureté de la crise économique qui sévit : le portier qui fournit à Annie les lettres à en-tête est terrorisé à l’idée de perdre son emploi, Annie vend ses pommes dans un flot de passants qui ne lui accorde aucune attention.

“Lady for a Day” reste avant tout une comédie très réussie. Les personnages sont d’autant plus truculents qu’ils sont amenés à jouer des rôles à contre-emploi : les danseuses de revues et les seconds couteaux doivent apprendre en accéléré les codes de la bonne société, c’est un escroc patenté qui prend au débotté le rôle du mari d’Annie.

J’ajoute que les dialogues sont savoureux. Capra et son scénariste/compère Riskin sont tellement doués qu’ils donneront naissance en 1934 à un genre spécifique de comédie, le “Screwball Comedy”, avec le film “New York – Miami”. “Screwball Comedy” que l’on peut traduire par comédie loufoque. Et pourtant, c’est dans “Lady for A Day” que l’on trouve déjà des réparties désopilantes. Ainsi la réplique d’un véritable majordome à un gangster qui joue les distingués : “si j’avais le choix des armes avec vous, monsieur, je choisirais la grammaire !