
Je connais peu de films qui débutent de manière aussi sensuelle que “le Patient Anglais” d’Anthony Minghella (1954 – 2008) : un pinceau dessine des arabesques sur un papier qui a l’apparence de la peau, un biplan aux ailes et au fuselage d’argent survole un désert dont les dunes font penser aux courbes d’un corps féminin …
À chaque vision de ce film, je suis subjugué par la beauté des images, la sophistication du scénario et du montage, une musique envoûtante, une réalisation et une interprétation exceptionnelles. Certaines séquences restent magiques, comme le dévoilement d’une fresque de la renaissance dans le balancement d’une torche ou bien encore la transition entre les dunes de sable et les draps d’un lit qui ondulent. Même les corolles des parachutes allemands trouvent de la grâce …
Et puis il y a la passion qui s’empare de ceux qui pensaient ne pas pouvoir s’aimer, dans l’élégance “art-déco” des palaces coloniaux et la beauté intemporelle des oasis.
« Cheek to cheek », la Chanson composée par Irvin Berlin pour “Top Hat”, grésille dans un cloître toscan : “Heaven, I’m in heaven and my heart beats so that I can hardly speak …”
Mais de l’enfer au paradis, il n’y a qu’un pas, vite franchi en temps de guerre. L’horreur des combats, le sordide des comportements viennent contrebalancer la vision trop esthétisante du récit : des corps sont déchiquetés dans l’explosion d’une mine, mutilés sous la torture ou désarticulés dans les tôles tordues d’un avion.
Ce film a reçu quasiment tous les prix en 1996, dont neuf oscars.
Ps : vous trouverez dans le film, deux biplans des années 1930, biplace et avec un cockpit ouvert. Le « jaune » , c’est un “American Stearman model 75”, le modèle qui poursuit Cary Grant dans « La mort aux Trousses » et que pilote Charley Varrick (voir le film chroniqué ce mois). L’autre biplan, couleur « Argent », est un avion britannique, le “De Haviland DH82 Tiger Moth”, avec un avant plus profilé et une ligne magnifique.