“le sergent dans la neige” de Mario Rigoni Stern (1953)

Alpini en Russie 1943

J’aime beaucoup les livres de Mario Rigoni Stern (1921-2008). Il est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands écrivains italiens du XXème siècle. Originaire d’Asiago, à la pointe nord de l’Italie, plateau où se déroulèrent des combats terribles à l’automne 1918, Rigoni Stern est un conteur pacifique qui sait peindre magnifiquement la montagne, ses arbres, sa faune, ses bergers, ses chasseurs et ses contrebandiers. “le sergent dans la neige” tient une place à part dans son oeuvre. C’est le récit de son expérience dans le corps des chasseurs alpins italiens en Russie, pendant la seconde guerre mondiale. Il témoigne des souffrances endurées par un petit groupe de soldats, pourchassés par l’Armée rouge et battant en retraite dans d’immenses plaines enneigées. Lorsque je l’ai lu, j’ai pensé aux “Mémoires du Sergent Bourgogne” et à la débâcle de l’armée de Napoléon en 1812 : le même froid épouvantable, les attaques qui surgissent de nulle part et un néant glacé qui avale tout. Mais également à Maurice Genevoix, le poète de la Sologne, qui lui aussi parvenait à donner une lecture humaniste de l’expérience effroyable de la guerre. La plupart des livres de Mario Rigoni Stern sont édités par “la fosse aux ours”, un éditeur lyonnais sérieux que j’embrasse affectueusement.

PS : “la fosse aux ours” a publié “Sentiers sous la neige”. Dans ce recueil, Rigoni Stern décrit les neiges de son enfance : le première neige de l’hiver, puis la neige abondante et impalpable qui lui succède, les neiges de printemps … Extrait : “En levant les yeux vers le nord, on voyait une légère grisaille qui venait des cimes jusqu’aux bois, puis descendait sur le village. La pointe du clocher et ses cloches étaient déjà noyées dans ce gris laiteux, puis c’était le tour de l’église et des toits des plus hautes maisons. Sur les routes poussiéreuses, sur les piles de bois, sur les cours et sur nos têtes ébouriffées tombaient les premiers flocons. Nous ouvrions la bouche vers le ciel pour les sentir fondre sur la langue.”